Reconnaître l'évidence, un devoir de dignité
Depuis la publication de Nations Nègres et Culture en 1954, une thèse totalement renforcée par les conclusions du colloque du Caire en 1974, les gardiens du temple de Gobineau - le fameux théoricien de "l'inégalité des races" - ont revu leur mode opératoire. Devant l'impossibilité de masquer l'évidence de la culture intrinsèquement nègre de l'Egypte antique, ils tentent de gagner du temps, fuyant les débats scientifiques contradictoires, irradiant des momies (Ramsès II), se contentant de formuler des critiques aussi gratuites qu'inconsistantes - parce que jamais elles n’ont abordé les questions de fond notamment au plan linguistique ! - contre les arguments massues brandis par les chercheurs africains dont les plus réputés sont Cheikh Anta Diop, Théophile Obenga, Aboubacry Moussa Lam, etc.
Auparavant, des milliers de momies ont été détruites, des preuves irréfutables cachées dans les caves des musées, des témoignages capitaux (Herodote, Jambique, Strabon, Pythagore, Amien Marcellin, Volney, Champollion le jeune, Lepsius, etc.) passés sciemment sous silence, sans oublier la manœuvre qui consista à refuser de permettre l’analyse d’un millimètre de peau de la momie de Ramsès II, l’authentique, qui était d’une couleur noire charbon. Les vestiges de l’art égyptien sont d’ailleurs là pour rafraîchir la mémoire de ceux qui doutent encore des traits fondamentalement nègres du pharaon de la XIX dynastie.
Cette attitude aussi suspecte que malhonnête devrait faire réfléchir bien des Africains perdus dans les méandres d'une polémique à l'enjeu pourtant capital. Car il s'agit de réécrire la vraie histoire de l'humanité (Nègres, Blancs, jaunes, rouges), totalement dépouillée d'une idéologie dont les fondements se sont écroulés tel un château de sable.
Pour bien comprendre la démarche des chercheurs africains qui sont au moins aussi compétents que leurs homologues occidentaux, avec l'avantage inestimable de la maîtrise des langues africaines, il faut tout simplement se poser les bonnes questions.
Pourquoi les savants de l'antiquité Grecs et latins, ancêtres des européens qui avaient, pour paraphraser Cheikh Anta Diop "atteint un niveau de maturité" incontestable, ont témoigné de façon unanime que les Egyptiens étaient "noirs et qu'ils avaient les cheveux crépus" (Herodote, Livre II) ? Pourquoi le livre de Volney évoquant les traits indiscutablement nègres de Egyptiens de l’antiquité a-t-il autant gêné l’idéologie occidentale ? Que penser d’un savant comme Champollion Figeac qui déclare de manière péremptoire que les cheveux crépus et la peau noirs ne sont pas les traits indiscutables d’un nègre ?
"(...) ces deux qualités physiques (les cheveux crépus et la peau noire) ne suffisent pas pour caractériser la race nègre (...)" (Lire Champollion-Figeac, Egypte ancienne, P.26-27) est en réalité le plus bel aveu d’impuissance de l’idéologie qui veut falsifier délibérément l’histoire de l’humanité.
Pourquoi le sieur Charles Dawson a-t-il confectionné de toutes pièces l’homme de Piltdown (face humaine et mâchoire de babouin) pour tromper le monde scientifique pendant un demi-siècle si ce n’était pour renforcer la thèse qui voulait l’homme africain, le Nègre, soit un leucoderme « négrifié » par le climat, descendu tout droit du continent européen ?
Pourquoi dans ce cas, tous les spécimens d’hommes fossiles les plus anciens, de l’australopithèque à l’homo sapiens sapiens, se retrouvent en Afrique à l’exception de tout autre continent et que les écarts en l’Afrique et les autres continents se mesurent parfois en dizaines voire en centaines de milliers d’années ?
Comme on le voit si bien, quand les problèmes sont bien posés en mettant de côté les attitudes aussi vaniteuses que puériles, les solutions coulent de source. L’homme est né en Afrique, sous la forme de l’espèce la plus naturelle de ce continent, y a développé la technique, les sciences, les arts, la philosophie, bref la civilisation.
Dès lors, il faut avoir la dignité d’admettre la vérité scientifique, étant entendu que les Noirs n’ont pas dominé la nature parce que tout simplement ils étaient de cette couleur de peau. Car ce serait reconnaître que tous les hommes ne sont pas égaux, n’en déplaise aux « circonvolutions du cerveau » d’un Larousse, Levi Strauss, Hegel, Voltaire, Montesquieu, qui nourrissaient le secret espoir que la nature des choses soit ainsi…
Saliou Samb