PRÉSIDENTIELLE FRANÇAISE
Bye bye Mister Bling Bling !
Par Saliou Samb
Il avait misé sur les divisions des Français, arpenté des chemins tortueux, repris à son compte les thèmes chers au Front national (nation, immigration, sécurité, etc) et promis à ses compatriotes, sans doute pour les amadouer, de relancer une croissance économique plombée par la crise financière. Il y avait mis son style propre, moulé à la fois dans un mélange de démagogie, de mépris, de prétention et de condescendance. Jamais vie privée d’un président de la république française n’a été aussi exposée pour son propre plaisir ! Même Felix Faure, mort en pleins ébats (le 16 février 1899), obligeant sa partenaire d’un après midi à filer à l’anglaise, n’était pas allé aussi loin. A l’heure des comptes, l’homme qui promettait à ses partisans une « France forte » s’est retrouvé, sous les coups de boutoir de son adversaire qu’il a trop longtemps sous estimé, le nez dans la poussière sans comprendre ce qui lui arrive.
De Nicolas Sarkozy, les Français retiendront sans doute l’image d’une personnalité incroyablement agitée, volontariste, s’affichant au Fouquet's quelques heures seulement après son élection, puis bronzant à bord du « yatch d’un ami » et qui aimait à s’adresser à ses interlocuteurs sur un ton de donneur de leçons. Imbu de sa personne, il cherchait surtout à jouer sur les peurs. Les Français se souviendront également d’un président qui a voulu manœuvrer dangereusement pour imposer son fils à la tête du prestigieux quartier de la Défense. Passons, sur le projet de loi sur le « rôle positif de la colonisation » heureusement bloqué à temps. Passons également sur toutes ces décisions concernant la presse publique française cherchant tout simplement à assujettir cette dernière à son pouvoir ! Quid du projet de suppression du juge d’instruction, trop « libre » au goût de Nicolas ?
Les Américains trouveront « méprisable » (qualificatif donné par un éditorialiste du New York times à l’extrême droitisation du discours du désormais ex président français) cette course effrénée aux voix des militants de Marine Lepen. Les Asiatiques se souviendront de ses convictions changeantes dans le bras de fer qui l’a opposé à la Chine. Les Africains, eux, auront beaucoup de mal à oublier le « discours de Dakar », même s’ils ont découvert plus tard que le texte a été rédigé par un « mauvais génie » (son conseiller spécial, Henri Guaino). Evidemment, son ministre de l'intérieur Claude Guéant, l’homme pour qui « toutes les civilisations ne se valent pas » (il fallait oser le dire, sans blague !), taxé d’attaché de presse du Front national par un humoriste français, ne saurait impressionner Guaino au chapitre de boulettes…
Tout au long de sa présidence, Nicolas Sarkozy a en réalité tenté d’imposer une marque confuse : contre l’avis de bon nombre de ses compatriotes, il a reçu à grandes pompes un Mouhamar Kadhafi avant de lâcher quelques mois plus tard le dictateur de Tripoli. L’histoire dira plus tard si cette extension du mandat des Nations Unies était plus une volonté de solder des comptes personnels (1) ou s’il l’a réellement fait pour sauver le peuple de Benghazi. Avec les mêmes honneurs, il a reçu le Syrien Bashar El Assad, celui-là même dont il a dénoncé, durant les derniers mois de son mandat, la boucherie orchestrée contre son propre peuple. Et par la suite, c’était pour faire la leçon à Laurent Gbagbo, quoique ce dernier ne soit pas un modèle.
Sarkozy, l’homme qui voulait nettoyer la « racaille » des banlieues parisiennes, était surtout un sacré personnage qui aimait passer pour quelqu’un qui avait de l’autorité, qui aimait les histoires sans maîtriser les contours des tensions inutiles qu’il provoquait (Islam de France et Islam en France, travail et vrai travail, la liste est trop longue), qui adorait parler d’histoire sans prendre la peine de donner à ce mot tout son sens.
L’échec du 6 Mai est à donc un échec personnel du créateur de l’UMP. Comme les Sénégalais l’ont fait avec Abdoulaye Wade (battu par Macky Sall), ses compatriotes en élisant François Hollande, ont tout simplement voulu lui dire à Sarkozy, ce personnage atypique, aimant la vie, les discours lyriques et feux des projecteurs, « bye bye mister bling bling » !
(1) Le site médiapart à publié un document indiquant que Kadhafi aurait financé la campagne de 2007 de Sarkozy à hauteur de 50 millions d’euros soit deux fois plus qu’il n’en faudrait pour un campagne normale.